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Soutenance de thèse de Lucas Lesaint

Amphi Moule, campus de Rennes

Stockage de carbone dans les sols au voisinage de haies, dans des systèmes de cultures associés à l’élevage, sous climat tempéré

Thèse dirigée par Valérie Viaud, UMR Sol, Agro et hydrosystème, Spatialisation (SAS)
Spécialité : tatistique/Modélisation en écologie, géosciences, agronomie et alimentation

Résumé

Dans son dernier rapport de 2023, le groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) met en avant l’importance de solutions basées sur une gestion durable des terres agricoles pour atteindre les objectifs de neutralité carbone à l’échelle du globe d’ici 2050. Dans ce contexte, les systèmes agroforestiers sont considérés comme un moyen pertinent de compenser les émissions de carbone (C) anthropiques tout en conservant une surface agricole importante destinée aux cultures non ligneuses. Les haies sont en effet la forme d’agroforesterie actuellement la plus répandue dans l’ouest de l’Europe ; elles sont souvent insérées dans des systèmes de culture associés à l’élevage. En France, les linéaires de haies dans les espaces agricoles sont néanmoins en régression. Si des synthèses de la littérature montrent une augmentation du stockage de C dans les sols dans les systèmes agroforestiers, les références disponibles sur le stockage de carbone (C) dans les systèmes avec des haies, en contexte tempéré, restent peu nombreuses. La littérature montre aussi la forte variabilité du stockage additionnel de C au voisinage des haies, et questionne l’existence d’un stockage additionnel en bordure de prairies. 

L’objectif de cette thèse est de produire des références complémentaires sur le stockage de C du sol au voisinage de haies, et de caractériser les facteurs de contrôle de la variabilité de ce stockage. Les facteurs de contrôle considérés concernent les propriétés, les caractéristiques des systèmes de cultures en termes d’usage et de pratiques dans la parcelle bordée par la haie, et les caractéristiques des haies. Le travail est centré sur des contextes de climat tempéré, et des haies insérées dans des systèmes associés à l’élevage. Cet objectif principal se divise en trois sous questions de recherche. La première vise à caractériser la variabilité inter-sites du stockage additionnel de C du sol et de comprendre quels sont les caractéristiques du continuum haie-parcelle qui vont contrôler cette variabilité. La deuxième question de recherche a pour objectif d’étudier les formes de stockage du C additionnel au voisinage des haies en fonction des caractéristiques du continuum haie-parcelle et en fonction de la profondeur. La dernière question de recherche vise à caractériser la distribution spatiale des entrées de C au sol au niveau de deux parcelles avec des stocks additionnels de C contrastés. 

Nous nous appuyons pour cela sur un échantillonnage des sols sur 90 cm de profondeur à différentes distances de haies, dans des parcelles agricoles présentant une diversité d’usages (culture annuelles, successions cultures annuelles – prairies temporaires, et prairies permanentes) et un gradient de texture des sols. Les parcelles agricoles ainsi que les haies qui les bordent ont été caractérisées en détail (contexte pédoclimatique, type et mode de gestion des parcelles, typologie et morphologie des haies…). Nous mobilisons une approche synchronique qui compare, à une même date, les stocks de C à proximité des haies aux stocks à une distance éloignée considérés comme stocks de référence. 

Les résultats confirment un stockage additionnel de C dans le sol au voisinage des haies, qui est en moyenne de 0.69 Mg C. 100m-1, soit 23 t C. ha-1. Les stocks additionnels sont cependant associés à une forte variabilité entre les sites d’études. Au niveau des prairies de l’échantillonnage, un usage des sols où le potentiel de stockage de C des haies est controversé, la présence de haies est associée à un stockage additionnel de C. Les résultats mettent également en évidence l’impact de l’occupation du sol au pied de la haie par rapport à celle de la parcelle adjacente, qui est le facteur de contrôle principal de la variabilité du potentiel de stockage additionnel du C du sol.
Ce travail de thèse met donc en avant le potentiel des haies et de la gestion des parcelles adjacentes qui y sont associées à stocker du C supplémentaire dans les sols. Le C additionnel est stocké préférentiellement dans la fraction grossière du sol (>50 μm), y compris dans les horizons les plus profond (30-90cm). Il correspond donc majoritairement à du C facilement minéralisable et donc sensible à des modifications du mode de gestion du continuum haie-parcelle. 
Les conclusions de cette thèse posent également de nouvelles questions. Il serait maintenant important d’orienter de nouveaux travaux de recherche pour caractériser les entrées de C à une échelle de temps plus longue et plus en profondeur pour les mettre en lien avec les stocks de C du sol. Il conviendrait également d’analyser les processus de stockage de C au voisinage des haies, et notamment l’impact des haies sur ces processus par l’intermédiaire de la modélisation de la dynamique du stockage de C.